L’itinérance chez les personnes racialisées
An English version of this blog post is available here.
Je prépare un manuel à libre accès sur l’itinérance et je viens de publier le chapitre 7, qui se concentre sur l’itinérance vécue par les peuples autochtones, notamment en Australie, au Canada et en Nouvelle-Zélande. La version PDF du chapitre complet est disponible ici (en anglais seulement).
Voici 10 point à retenir :
1. Les personnes racialisées, que l’on appelle également « personnes de couleur » ou « minorités raciales/ethniques », sont souvent surreprésentées parmi les personnes en situation d’itinérance. La plupart des pays ont connu un passé raciste et connaissent toujours un racisme systémique, compliquant l’accès des personnes racialisées aux services sociaux, dont le logement, l’aide au revenu et les soins de santé.
2. Pour comprendre certains des défis auxquels sont confrontées les personnes racialisées, il faut comprendre ce qu’est le colonialisme. Le colonialisme peut inclure l’expulsion forcée de personnes de leurs terres, l’appropriation de terres, la destruction de villages et de cultures, l’esclavage et les lois sur le vagabondage concernant les esclaves libérés. La violence sanctionnée par le gouvernement est à l’origine d’une grande partie de ce phénomène.
3. Le racisme est ancré dans le colonialisme. On peut définir le racisme comme « un système d’avantages et de désavantages fondés sur la race… [Cela] comprend les croyances et les pratiques individuelles, les messages culturels, les politiques publiques et d’autres dynamiques interconnectées aux niveaux micro et macro qui profitent aux blancs et nuisent aux personnes de couleur[1]. »
4. Le racisme complique l’obtention d’un logement pour les personnes racialisées. Il leur est également plus difficile de s’épanouir dans l’enseignement, d’obtenir un emploi, de bénéficier d’une aide au revenu et de recevoir des soins de santé. Le racisme affecte les personnes ciblées par les services policiers, celles qui ont accès à une représentation juridique, celles qui vont en prison et pour combien de temps. Il a une incidence sur les parents (principalement les mères) qui sont ciblés par les services de la protection de l’enfance et dont les enfants sont pris en charge. En bref, le racisme affecte la prestation des services sociaux.
5. Dans le secteur de l’aide aux sans-abri, les outils d’évaluation permettent de prioriser les besoins en matière de services ainsi que d’évaluer les besoins ou la vulnérabilité d’une personne. Cependant, ces outils peuvent créer des difficultés supplémentaires pour les personnes racialisées. En effet, de nombreuses recherches ont montré que ces outils de triage peuvent donner la priorité aux blancs sur les personnes racialisées.
6. En apportant des améliorations bien ciblées aux financements, nous serions en mesure d’aborder certains de ces défis. Dans la plupart des pays, les services sociaux fournis aux personnes racialisées sont considérablement sous-financés; des apports de fonds importants pourraient contribuer à la fois à prévenir et à répondre à l’itinérance chez les personnes racialisées. Cela comprend un financement pour l’éducation, l’emploi, les soins de santé, le développement de la petite enfance (p. ex., les garderies), l’aide au revenu, le logement, la prévention des expulsions, les structures d’urgence et les services d’approche.
7. La représentation peut également faire une différence. Selon Olivet et al. (2021), les organismes sans but lucratif du secteur de l’aide aux sans-abri « devraient assurer la diversification de leur personnel, de leurs dirigeants et de leur conseil d’administration afin d’inclure une représentation importante de personnes de couleur[2]… » Une meilleure représentation peut entraîner d’avantage de services adaptés à la réalité culturelle.
8. L’importance de la programmation. Que vous soyez responsable d’un refuge d’urgence, d’un service d’accueil de jour ou d’un logement, il peut s’avérer utile d’offrir des services pertinents sur le plan culturel de façon régulière. De tels programmes peuvent comprendre de la musique, de l’art et de l’artisanat, un soutien linguistique et un soutien relié à l’alimentation qui peuvent être utiles aux personnes racialisées.
9. La formation du personnel peut faire toute la différence. Les agences sans but lucratif devraient organiser des séances de formation du personnel contre le racisme menées par des personnes racialisées. Cette formation peut prendre la forme de séances de formation d’une journée entière et devrait avoir lieu au moins une fois par an. Le personnel devrait également être encouragé à rechercher une formation antiraciste en dehors de ces événements internes, au sein de la communauté locale.
10. Une évaluation et une vérification continues sont essentielles. Les organismes devraient s’efforcer à se responsabiliser. Les mécanismes de responsabilisation peuvent inclure un cadre d’évaluation comprenant les entrées, les sorties et les résultats spécifiques aux clients racialisés. Ce cadre peut également comprendre une enquête annuelle s’adressant spécifiquement au personnel et aux clients racialisés. Les personnes racialisées devraient participer à l’élaboration de tout cadre d’évaluation, ou du moins des éléments axés sur les personnes racialisées.
En résumé. Ceci est un sommaire du chapitre 7 d’un manuel interdisciplinaire à libre accès rédigé par un auteur et ayant pour objectif de fournir une introduction à l’itinérance pour les étudiants, les prestataires de services, les chercheurs, les décideurs politiques et les défenseurs. Tout le matériel de ce livre est disponible gratuitement ici. Les nouveaux chapitres seront téléchargés au fur et à mesure qu’ils seront complétés tout au long de l’année.
Je tiens à remercier Sylvia Regnier et Annick Torfs pour l’aide qu’elles m’ont apporté dans la préparation de ce billet de blogue.
[1] Richard, M. K. (2023). Race matters in addressing homelessness: A scoping review and call for critical research. American Journal of Community Psychology.
[2] Olivet, J., Wilkey, C., Richard, M., Dones, M., Tripp, J., Beit-Arie, M., Yampolskaya, S., & Cannon, R. (2021). Racial inequity and homelessness: findings from the SPARC study. The ANNALS of the American Academy of Political and Social Science, 693(1), 82-100.