L’itinérance chez les adultes plus âgés

Feb 1, 2025

An English version of this blog post is available here.

Je rédige un manuel à libre accès sur l’itinérance et je viens de publier le chapitre 10 qui porte sur les adultes plus âgés. La version PDF du chapitre au complet est disponible ici [en anglais seulement].

Voici dix points à retenir :

1. Une variété de problèmes de santé physique affectent les adultes plus âgés plus qu’ils n’affectent les jeunes personnes. Parmi ces problèmes, on compte : un manque de force physique, l’incontinence, des problèmes aux pieds liés au diabète, des défis de vue (souvent causés par le diabète), l’arthrite et des maladies respiratoires. Bon nombre de ces défis entraînent des difficultés de mobilité, les escaliers devenant particulièrement problématiques (p. ex., conception universelle).

2. La même constatation peut être faite en ce qui concerne les défis posés par les maladies mentales. Les adultes plus âgés peuvent éprouver des problèmes cognitifs (p. ex., de la confusion), différentes formes de démence, de la dépression (souvent le résultat d’un isolement social) et de l’anxiété. Cette situation peut être exacerbée par le fait que, dans de nombreux cas, les professionnels médicaux tardent à diagnostiquer ces affections et parfois même ne les diagnostiqueront pas du tout. Certains de ces défis peuvent se transformer en comportements qui peuvent entraîner leur expulsion de leur logement.

3. Certains adultes plus âgés ne sont pas capables de se rendre à leurs rendez-vous. Les appareils fonctionnels (p. ex., fauteuils roulants, scooters, déambulateurs) rendent les déplacements très difficiles lorsqu’il y a de la neige sur le sol ou lorsque le temps est humide. De plus, les véhicules de grande taille qui peuvent transporter les personnes qui doivent utiliser de tels appareils fonctionnels ne sont pas toujours disponibles.

4. La victimisation chez les personnes âgées se manifeste sous de nombreuses formes. Les personnes plus âgées peuvent être victimes de fraude. Dans certains cas, cela peut se produire lorsque des inconnus ciblent les personnes âgées par téléphone, courriel ou sur les médias sociaux. Dans d’autres cas, les enfants adultes des personnes âgées peuvent s’approprier l’argent ou des objets de valeur de leurs parents de manière insidieuse (p. ex., « Tu n’as plus besoin de ça. ». Certains enfants adultes tenteront également de pousser leurs parents à modifier leur testament. Dans les lieux de rassemblement, (p. ex., les refuges d’urgence) il arrive que les personnes âgées soient victimes d’agressions physiques, de harcèlement et d’intimidation.

5. Il est impératif d’effectuer des évaluations gériatriques détaillées. Il s’agit d’évaluations sur les problèmes de santé, le mouvement physique, les aptitudes cognitives, les soutiens sociaux et les défis concernant les médicaments. L’équipe de professionnels procédant à une telle évaluation peut comprendre un médecin de famille, une infirmière praticienne, une infirmière diplômée, un ergothérapeute, un physiothérapeute, un travailleur social, un pharmacien, un récréothérapeute, un orthophoniste et un diététicien. Un gériatre ou un psychiatre gériatrique peuvent être consultés au cours du processus.

6. La sécurité alimentaire est un défi important pour les adultes plus âgés. Les programmes alimentaires permettent de livrer des aliments nutritifs au domicile des adultes plus âgés. Dans certains cas, il est possible d’organiser la préparation de repas communautaires pour ces personnes qui vivent près les unes des autres. Bon nombre d’adultes plus âgés ont également besoin d’aide pour découvrir les programmes alimentaires dont ils peuvent bénéficier, pour commander les aliments et pour effectuer les paiements. Beaucoup d’entre eux ont besoin d’aide pour acheter de la nourriture et les articles ménagers que l’on achète généralement dans les épiceries (p. ex., articles ménagers de base). Lorsqu’un programme alimentaire est bien conçu, il devrait pouvoir soutenir des exigences diététiques spécifiques et fournir des aliments précoupés et en purée pour les personnes qui ont des problèmes à mâcher et à avaler.

7. Les grands centres urbains devraient veiller à ce que des refuges d’urgence et des centres de jour soient disponibles spécifiquement pour les adultes plus âgés. Étant donné que les adultes plus âgés présentent des vulnérabilités uniques, il serait sensé de concevoir des lieux de rassemblement au sein du secteur de l’aide aux sans-abri spécialement mis sur pied pour eux (en tenant compte du fait que les adultes plus âgés peuvent être susceptibles d’être exploités par des personnes plus jeunes). Les services offerts dans de telles installations devraient comprendre l’accès à un médecin, des gériatres, des psychiatres, des physiothérapeutes et des podologues. La plupart de ces services devraient être fournis sur place dans l’établissement. De tels espaces devraient être accessibles aux fauteuils roulants, aux déambulateurs et aux scooters.

8. La réduction des méfaits est nécessaire dans les établissements de soins de longue durée. Les établissements de soins de longue durée, que l’on connait aussi sous le nom de maisons de retraite, ont un rôle très important à jouer, et en particulier pour les personnes âgées qui ont des besoins de soins de santé complexes (p. ex., maladie de Parkinson avancée, SLA, démence). Davantage d’établissements de soins de longue durée devraient être axés sur la réduction des méfaits, c’est-à-dire qu’ils devraient autoriser les patients à consommer de l’alcool, du cannabis et des produits de tabac.

9. L’accès à des logements supervisés pour adultes plus âgés est essentiel. Il y a de nombreuses personnes âgées semi-indépendantes qui requièrent l’aide d’un personnel de soutien 24 heures sur 24 dans leur édifice, mais pas au même degré que dans les établissements de soins de longue durée. On peut qualifier ce modèle pour personnes âgées semi-indépendantes de logement supervisé pour personnes âgées. Certains édifices, en particulier dans les grandes villes, peuvent répondre aux besoins de sous-populations spécifiques, telles les peuples autochtones, les locataires 2SLGBTQQIA+ et les personnes qui parlent une langue spécifique ou s’identifient à une culture particulière.

10. Les logements supervisés pour personnes âgées permettent de réaliser des économies. Une étude canadienne menée récemment a dévoilé que les coûts opérationnels annuels d’un logement supervisé ne représente qu’un tiers du coût d’un lit dans un établissement de soins de longue durée[1].

En résumé. Ceci est un sommaire du chapitre 10 d’un manuel interdisciplinaire à libre accès rédigé par un seul auteur et ayant pour objectif de fournir une introduction à l’itinérance pour les étudiants, les prestataires de services, les chercheurs, les décideurs et les défenseurs. Tout le matériel de ce livre est disponible gratuitement ici. Les nouveaux chapitres seront téléchargés tout au long de l’année.

Je tiens à remercier Jenny Morrow et Annick Torfs pour leur aide dans la préparation de ce billet de blogue.

[1] Doupe, M., Finlayson, G., Khan, S., Yogendran, M. S., Schultz, J., McDougall, C., & Kulbaba, C. (2016). Supportive housing for seniors: Reform implications for Manitoba’s older adult continuum of care. Winnipeg: Manitoba Centre for Health Policy.