Une introduction au logement supervisé et le Logement d’abord

Une introduction au logement supervisé et le Logement d’abord

Une introduction au logement supervisé et le Logement d’abord

An English-language version of this blog post is available here.

Le 3 février 2021, j’étais conférencier dans le séminaire d’études supérieures de Greg Suttor au département de géographie et de planification de l’université de Toronto (un grand honneur puisque Greg est un de mes mentors depuis longtemps). Ma présentation portait sur les liens entre les univers du logement et du sans-abrisme au Canada (et plus particulièrement à Toronto).

La présentation entière et détaillée est disponible (en anglais) ici.

Voici 10 choses à savoir à ce sujet :

1. Au Canada, la plupart des gens qui réfléchissent à la question s’entendent pour dire que le logement subventionné est essentiel afin de le prévenir et de répondre au sans-abrisme. Toutefois, il existe des débats importants : la quantité additionnelle de logements abordables requis; à qui devraient servir le nombre limité de logements; quels sont les meilleurs modèles de logements subventionnés; et à quel degré chaque logement devrait-il être subventionné?

2. Les élus ne s’entendent pas sur la répartition des couts des subventions. À l’heure actuelle, le consensus est que le gouvernement fédéral canadien devrait s’acquitter des frais de développement (par exemple, le capital), mais on ne s’entend pas à savoir qui devrait financer les frais d’exploitation conséquents. Les paliers de gouvernements jouent en quelque sorte à voir qui cèdera en premier, ce qui limite la quantité de nouveaux logements abordables créés chaque année.

3. En Ontario, lorsque le sans-abrisme est survenu comme défi de politique publique dans les années 80, les personnes itinérantes sont devenues un point focal majeur de la politique sur le logement. Une approche de l’époque consistait à reloger les itinérants dans des logements abordables et leur offrir de l’assistance sociale. Aujourd’hui, cette approche s’appelle le logement supervisé (et de nos jours, Logement d’abord en est presque un synonyme). La plupart des résidents qui ont recours au logement supervisé au Canada sont des adultes célibataires n’ayant personne à charge et qui ont de sérieux défis de santé mentale. 

4. Ce changement de cap n’est pas survenu dans un vacuum politique – assurément, le militantisme politique a joué un rôle central à son avènement. À Toronto, cela a compris la création du Singles Displaced Persons Project (ou « le projet des personnes célibataires déplacées »), du mouvement des « survivants/consommateurs » qui avait pour slogan « homes not hostels » (ou « un domicile, pas du dépannage ») ainsi que la mise sur pied d’organismes tels Houselink Community Homes, et Homes First Society.

5. Le genre d’appui social offert conjointement avec le logement supervisé fait l’objet de débat. Lorsque j’offrais de tels appuis en travaillant à Toronto, j’aidais les locataires à tenir compte de leurs rendez-vous (par exemple chez le médecin, avec de travailleurs sociaux pour le revenu, ou pour des comparutions en cour). Je les ai souvent accompagnés à leurs rendez-vous. Je les ai défendus s’ils étaient menacés d’éviction et les ai aidés à déménager lorsque cela était nécessaire. Il m’est souvent arrivé de les inviter à prendre un café également.

6. Le logement supervisé permanent adapté au milieu facilite l’organisation d’activités sociales en groupe. On parle ici d’un édifice entier où l’ensemble des locataires ont recours au logement supervisé (plutôt qu’une simple proportion de ses locataires). Ce genre de logement supervisé comprend habituellement du personnel d’appui sur place et dans certains cas, le personnel demeure sur place en tout temps. Le logement supervisé permanent adapté au milieu peut offrir un important appui avec la gestion d’invités et facilite la mise sur pied de programmes alimentaires, d’exercice physique, et de cours d’art.

7. Au Canada, le concept de Logement d’abord – qui est presque synonyme du logement supervisé – a commencé à être accepté au début des années 2000. La Ville de Toronto a beaucoup misé sur le concept à partir de 2005, et la Calgary Homeless Foundation s’y est intéressée également; les militants et les intervenants du domaine s’en servent maintenant à travers le Canada. La stratégie du Logement d’abord permet d’éliminer la condition exigeant qu’un locataire potentiel soit « prêt » à être logé pour l’être.

8. L’idéologie entourant le Logement d’abord ne se situe ni à droite ni à gauche de l’échiquier politique. Elle sert plutôt de “troisième approche” stratégique grâce à laquelle elle trouve des adeptes parmi les entrepreneurs chefs de fil, les élus de toute allégeance politique, et toute une gamme de militants. Cela s’explique en partie par le fait que le Logement d’abord promeut habituellement une redistribution des ressources existantes. Ça s’explique aussi par le fait que les adeptes du Logement d’abord favorisent l’usage de logements privés à but lucratif plutôt que des logements appartenu par des organismes à but non lucratif.

9. Le mérite de l’approche Logement d’abord a été démontré davantage par l’étude canadienne At Home/Chez soi. Dans cette étude randomisée et contrôlée, des participants de cinq villes avec des besoins modérés ont reçu une forme de Logement d’abord incluant une intervention de type Soutien d’intensité variable, tandis que les participants avec des besoins élevés ont reçu une forme de Logement d’abord incluant une intervention de type Suivi intensif. Les participants ont été interviewés tous les trois mois pendant deux ans. Les résultats étaient concluants et moins dispendieux.

10. La Stratégie nationale sur le logement, dévoilée en 2017, ne contient aucune provision spécifique pour le logement supervisé, et ne mentionne pas le Logement d’abord. Pourtant, dans le discours du Trône de septembre 2020, le gouvernement canadien s’engageait à « complètement éliminer le sans-abrisme chronique ». De plus, seulement 5% du nouvel argent a été mis de côté pour réduire le sans-abrisme chronique.

En conclusion, la bonne nouvelle c’est que la plupart des leadeurs du Canada croient que le logement supervisé est une bonne façon de prévenir et de répondre au sans-abrisme. Leur usage du langage de Logement d’abord en témoigne. La mauvaise nouvelle, c’est que la plupart des élus hésitent à engager les fonds nécessaires pour réduire le sans-abrisme – par exemple, la Stratégie nationale sur le logement semble insuffisamment financée pour atteindre l’objectif du gouvernement canadien de mettre fin au sans-abrisme chronique.

Je voudrais remercier Damian Collins, Stéphan Corriveau, John Ecker, Joshua Evans, George Fallis, Susan Falvo, Hayley Gislason, David Hulchanski, Michel Laforge, Steve Lurie, Geoffrey Nelson, Deborah Padgett, Angela Regnier, John Rook et Vincent St-Martin pour leur aide à la rédaction de ce billet.

Les effets à long terme de la récession de la COVID-19 sur le sans-abrisme au Canada

Les effets à long terme de la récession de la COVID-19 sur le sans-abrisme au Canada

Les effets à long terme de la récession de la COVID-19 sur le sans-abrisme au Canada

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J’ai rédigé un rapport pour Emploi et Développement social Canada qui présente les impacts les plus probables de la récession actuelle sur le sans-abrisme. Le rapport complet est disponible (en  anglais) ici.

Voici 10 choses à savoir à ce sujet.

  1. La récession actuelle risque de contribuer au sans-abrisme au Canada, mais plusieurs facteurs influenceront son ampleur. Parmi ceux-ci : le ressentiment des effets de la récession pourrait prendre jusqu’à cinq ans; les nombreux inconnus à l’horizon (par exemple, de potentielles vagues subséquentes de la pandémie, le développement d’un vaccin, la nature de futures prestations); les variantes démographiques d’une communauté à l’autre (notamment en ce qui concerne le marché du travail et le marché immobilier).
  1. L’effet de décalage de cinq ans s’explique en partie par la lutte pour éviter de perdre leur logement. Lorsque les ménages affronteront une perte de revenu ou d’emploi, ils pourraient tenter de négocier des arriérés de loyer avec le propriétaire de leur domicile; ils pourraient aussi emprunter de l’argent à des amis ou à d’autres membres de leur famille. Ils pourraient tenter d’emménager avec des amis, de la famille, ou dans un logement plus abordable. Le système de bienêtre social canadien a également pour effet de retarder les effets de la récession. Par exemple, les prestations d’assurance emploi (et plus récemment la Prestation d’urgence canadienne) peuvent atténuer les effets d’une perte d’emploi, aidant ainsi les ménages à maintenir leurs logements. Même si elle est moins généreuse, l’assurance sociale peut également contribuer à retarder le sans-abrisme.
  1. L’effet de décalage donne aussi la chance aux paliers gouvernementaux supérieurs de prévoir des initiatives contre le sans-abrisme. Puisqu’il pourrait prendre encore quelques années pour que l’on perçoive la croissance du sans-abrisme dû à la récession actuelle, il y a suffisamment de temps pour concevoir, implanter et observer les retombées de nouvelles mesures préventives. Ces nouvelles mesures pourraient cibler des ménages qui risquent de perdre leur logement, ou qui sont nouvellement sans-abris.[1] 
  1. L’impact de la récession variera d’une communauté à l’autre à travers le pays. L’état des marchés immobiliers, des systèmes d’aide financière, et de la planification du sans-abrisme varie à travers le Canada. De plus, les trajets des sans-abris migrant à travers le pays seront difficiles à prévoir au cours des prochaines années. Conséquemment, il sera difficile de prévoir dans quelles communautés et à quel moment surviendra l’augmentation du sans-abrisme. Nous savons par contre que les personnes les plus affectées par la récession de la COVID-19 sont : les jeunes, les femmes, les personnes célibataires et les personnes sans diplôme d’études secondaires.
  1. Afin de tenir compte des nombreux facteurs en jeu, les fonctionnaires doivent surveiller une variété d’indicateurs. Le rapport recommande à EDSC de tenir compte des indicateurs suivants tout au long de la récession : le taux de chômage officiel, la proportion de Canadiens qui tombent sous la Mesure axée sur les conditions du marché (surtout ceux qui tombent sous le seuil de 75%)[2]; les taux d’aide sociale; le cout médian des loyers; le taux d’inoccupation des loyers; la proportion de ménages qui consacre plus de 50% de leur revenu sur l’habitation; les expulsions; et le taux d’occupation quotidien des refuges d’urgence.
  1. Il faudra faire preuve de nuances avec ces données. Autant que possible, il faudra surveiller l’évolution de ces indicateurs depuis le début de la pandémie, ainsi qu’à travers les différentes régions et groupes démographiques précis (par exemple les femmes, les jeunes, les Autochtones, etc.)
  1. Le rapport recommande au gouvernement fédéral d’améliorer l’Allocation canadienne pour le logement (ACL). Cette prestation offre une aide financière aux foyers à faible revenu afin de payer leur loyer. Il est prévu que la moitié de cet argent proviendra du gouvernement fédéral, et que l’autre moitié proviendra des gouvernements provinciaux et territoriaux. L’ACL devait être lancée le 1er avril 2020, cependant, il n’y a que cinq provinces qui ont signé l’entente. Le gouvernement fédéral pourrait augmenter son apport à l’ACL afin d’encourager le restant des provinces et territoires à en faire autant. Par exemple, le gouvernement fédéral pourrait offrir d’assurer les deux tiers ou les trois quarts des couts.
  1. Le rapport recommande également que le gouvernement fédéral fasse preuve de souplesse quant au recouvrement des montants excédentaires de la Prestation canadienne d’urgence (PUC) versés aux prestataires d’aide sociale. Il est nécessaire de souligner ce point vu la confusion considérable entourant le lancement de la PUC. Une telle approche pourrait comprendre un recouvrement partiel chez ces individus (par l’entremise du système d’impôts), et une amnistie totale devrait être considérée dans certains cas. 
  1. Le rapport recommande qu’EDSC mette sur pied une nouvelle source de financement pour le programme Vers un chez-soi (le véhicule principal par lequel le gouvernement fédéral lutte contre le sans-abrisme). Le rapport aborde la réussite d’effets préventifs aux États-Unis à la suite de la récession de 2008-2009, et encourage EDSC à mettre sur pied un programme semblable au Canada. Le programme pourrait mettre de l’avant une aide financière de courte-durée pour les ménages qui sont à risque de perdre leur logement, en train de le perdre, ou qui l’ont perdu récemment. Les cibles pourraient évoluer au fil du temps, à la lumière de changements survenant dans les indicateurs mentionnés précédemment (taux de chômage officiel, proportion des gens avec des revenus inférieurs à la Mesure axée sur les conditions du marché, etc.).
  1. Le rapport propose des changements politiques que pourraient entamer les gouvernements provinciaux et territoriaux. Ceux-ci comprennent une augmentation des prestations d’aide sociale, de rétablir l’admissibilité des gens disqualifiés de l’aide sociale à cause de la PUC, et encourager les refuges d’urgence à prioriser les solutions basées sur le logement.

En résumé, puisque nous sommes conscients que le sans-abrisme risque d’augmenter au Canada en raison de la récession, les paliers gouvernementaux supérieurs doivent limiter les dégâts. S’ils sont bien conçus, les efforts de prévention du sans-abrisme peuvent être plus économiques que des réponses d’urgences postérieures.

J’aimerais remercier Susan Falvo, Michel Laforge et Vincent St-Martin pour leur appui pendant la rédaction de ce billet.

[1] Il est également très important de continuer à adresser le sans-abrisme existant. J’ai écrit à ce sujet ici (billet en anglais).

[2] Pour d’autres informations par rapport à la Mesure axée sur les conditions du marché, lisez ce billet (en anglais).

Les effets à long terme de la récession de la COVID-19 sur le sans-abrisme au Canada

The long-term impact of the COVID-19 Recession on homelessness in Canada

The long-term impact of the COVID-19 Recession on homelessness in Canada

La version française de ce billet se trouve ici.

I’ve written a report for Employment and Social Development Canada (ESDC) that assesses the likely long-term impact of the current recession on homelessness. The link to the report is here.

Here are 10 things to know:

1. The current recession may contribute to rising homelessness across Canada, but that matter is complicated by several factors. Those factors include: a lag effect of up to five years from the time a recession starts until its impact fully plays out; the many unknowns that lie ahead (e.g., whether there will be future waves of the pandemic, when and if a vaccine is developed, what types of new social benefits are announced, etc.); and differences from one community to another (with respect to both the labour market and housing market, for example).

2. A recession’s lag effect stems in part from a strong desire of households to avoid absolute homelessness. When faced with reduced income or outright job loss, a household may try to arrange a rental arrears plan with their landlord; they may also borrow money from family and friends. They may try to move into cheaper housing as well, or move in with family or friends. The lag effect also stems from Canada’s elaborate social welfare system. For example, Employment Insurance (and more recently the Canada Emergency Response Benefit) can cushion the blow from job loss and help households hang on to their housing. Social assistance, while not as generous, can also delay homelessness onset.

3. This lag effect means there is time for senior orders of government to plan homelessness prevention initiatives. Since it could be a few years before we see rising homelessness in some communities as a result of the current recession, there is time for preventive measures to be designed, implemented and to take effect. Those measures could target households that are either at serious risk of becoming homeless or that have just become homeless.[1]

4. The recession’s impact on homelessness will vary from one community to another. Housing markets, income assistance systems and homelessness system planning frameworks vary across Canada. What is more, migration patterns over the next several years will be hard to predict. As a result, it is challenging to say which Canadian communities will see rising homelessness at what junctures in time. We do know that, thus far, the following types of workers in Canada have been most directly affected by the COVID-19 Recession: young people, women, nonmarried persons, and persons without high school accreditation.

5. In order to monitor the many complex factors involved here, policy-makers needs to track various indicators. The report recommends that ESDC track the following indicators as the recession unfolds: the official unemployment rate; the percentage of Canadians falling below the Market Basket Measure (and especially those falling below 75% of the Market Basket Measure);[2] social assistance benefit levels; median rent levels; the rental vacancy rate; the percentage of households with extreme shelter cost burdens; evictions; and average nightly occupancy in emergency shelters.

6. This tracking will require some nuance. As much as possible, such tracking should emphasize both how these indicators have changed since the start of the pandemic, and how this change varies across both geographical areas and specific populations (e.g., women, youth, Indigenous peoples, etc.).

7. The report recommends that the federal government enhance the Canada Housing Benefit (CHB). This benefit provides financial assistance to help low-income households afford rent. It is expected that half of this money will come from the federal government, and the other half from provinces and territories. The CHB was supposed to launch nationally on 1 April 2020; however, just five provinces have formally agreed to terms regarding the CHB. The federal government could increase the value of this benefit, which could encourage other provinces and territories to sign on. For example, the federal government might offer 2/3 or 3/4 cost-sharing.

8. The report also recommends that the federal government take a soft approach to recovering CERB overpayments from social assistance recipients. This is important in light of the considerable confusion that existed as the CERB was being rolled out. Such an approach might include not trying to fully recover the value of the CERB from these individuals (via the tax system). Even complete amnesty should be considered in some cases.

9. The report recommends that ESDC introduce a new funding stream for Reaching Home (i.e., the federal government’s main funding vehicle for homelessness). The report discusses the successful implementation of prevention efforts in the United States following the 2008-2009 Recession, and encourages ESDC to introduce something similar for Canada. A new prevention stream could focus on time-limited financial assistance directed at households who are either still housed (but at risk of becoming homeless), are in the process of losing their housing, or who have just begun to experience absolute homelessness. Targeting can evolve over time, in light of changes seen in the aforementioned indicators (e.g., the official unemployment rate, the percentage of persons with incomes below the Market Basket Measure, etc.).

10. The report identifies policy changes that could be made by provincial and territorial governments. These include increases to social assistance benefit levels, the reinstatement of social assistance eligibility for recipients who became ineligible due to the CERB, and the encouragement of housing-focused practices at emergency shelters.

In sum. Since we know there is serious risk for more homelessness in Canada as a result of the current recession, senior orders of government need to limit the damage. Well-designed prevention efforts can be more cost-effective than emergency responses after the fact.

I wish to thank Susan Falvo and Vincent St-Martin for assistance with this blog post.

[1] It is also very important to continue addressing existing homelessness. I’ve written about that here.

[2] For more on the Market Basket Measure, see this blog post.

L’isolement, la distanciation physique, et les prochaines étapes concernant le sans-abrisme : Un survol de 12 villes canadiennes

L’isolement, la distanciation physique, et les prochaines étapes concernant le sans-abrisme : Un survol de 12 villes canadiennes

L’isolement, la distanciation physique, et les prochaines étapes concernant le sans-abrisme : Un survol de 12 villes canadiennes

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Pendant la pandémie de la Covid-19, les fonctionnaires des grandes villes canadiennes ont travaillé de pair avec les responsables de la santé et d’autres secteurs afin d’augmenter la distanciation physique chez la population itinérante. Dans un récent rapport (disponible en anglais ici), j’offre un survol de ce à quoi ressemble la situation à Toronto, Montréal, Vancouver, Calgary, Edmonton, Ottawa, Winnipeg, Québec, Hamilton, Régina, Saskatoon et Saint-Jean.

Voici 10 points saillants issus du rapport.

  1. Le rapport a été commandé par la Calgary Homeless Foundation (CHF). En tant que planificateur du système d’aide aux itinérants, la CHF souhaitait faire un survol des actions prises par les autorités responsables en sans-abrisme dans d’autres villes pendant cette période sans précédent. Initialement, le rapport était destiné à un usage interne, mais la CHF a décidé de le rendre public afin que les intervenants en sans-abrisme, des chercheurs, et des militants d’ailleurs puissent mieux comprendre le portrait national.
  1. Les autorités responsables en sans-abrisme au Canada ont augmenté la distanciation physique grâce à de nombreuses mesures. Ils ont augmenté les mesures de distanciation physique dans les refuges existants, mis sur pied de nouvelles installations et créé des espaces prévus pour l’isolement et la quarantaine. Toronto et Vancouver se démarquent à cet égard puisque les deux villes ont garanti un nombre important de chambres d’hôtel pour qu’elles servent à ces fins.
  1. Les intervenants en sans-abrisme dans la plupart des grandes villes canadiennes ont continué à déplacer les gens des abris d’urgence vers des logements permanents. Ils ont également innové. Par exemple, plusieurs villes ont développé de nouveaux modèles pour déplacer les personnes itinérantes vers des logements permanents. Le rapport offre des explications détaillées à cet égard.
  1. Les réseaux de coopération entre les organismes se sont améliorés pendant la crise; cela est particulièrement vrai des intervenants en santé. Dans plusieurs cas, il existait la perception que les responsables locaux en santé étaient peu engagés à adresser le sans-abrisme, mais qu’ils ont amélioré leur approche pendant la pandémie. Il est espéré que ces formes de collaboration se maintiennent.
  1. Plusieurs autorités responsables dans le secteur du sans-abrisme ont exprimé leur frustration par rapport au manque de collaboration du secteur correctionnel. Le rapport souligne que les intervenants du secteur correctionnel libèrent les détenus sans prévoir leur hébergement, et sans faire appel aux intervenants en sans-abrisme afin de coordonner une transition vers un refuge d’urgence (il faut toutefois noter que Québec est une exception importante à cet égard).
  1. À travers le Canada, un nombre surprenant d’espaces prévus pour les itinérants demeurent ouverts (ou sont en cours de relocalisation). En d’autres mots, les nouvelles mesures de distanciation physique mises en place semblent durer plus longtemps que prévu. Ce « nouveau normal » variera cependant d’une ville à l’autre. Par exemple, la plupart des refuges à Calgary et Edmonton ne s’attendent pas à pouvoir se conformer à l’exigence de deux mètres.
  1. Il reste encore des défis dans le secteur. Bien que cela varie à travers le Canada, les défis suivants perdurent dans tout le secteur : le recours au sommeil extérieur; les salles de toilettes partagées ainsi que d’autres espaces partagées (sans compter les couts additionnels liés au nettoyage de ces espaces partagés); et le nouveau sans-abrisme engendré par le ralentissement économique[1].
  1. Le gouvernement fédéral canadien a annoncé d’importantes sommes de nouveaux financements depuis le début de la pandémie. Le gouvernement canadien a annoncé 157,5 millions de dollars en financement ponctuel pour Vers un chez-soi en mars 2020 (Vers un chez-soi est le véhicule de financement principal utilisé par le gouvernement fédéral pour lutter contre le sans-abrisme). De plus, en septembre 2020, le gouvernement canadien a annoncé 236,7 millions de plus pour Vers un chez-soi, ainsi qu’un milliard de dollars pour des logements modulaires, l’acquisition de terrain, et la transformation d’édifices existants en logement abordable.
  1. Toutefois, ces mesures de financement demeurent temporaires. Depuis le début de la pandémie, il n’y a eu aucune amélioration permanente au financement des initiatives luttant contre le sans-abrisme. Une telle amélioration pourrait : appuyer les intervenants locaux à maintenir la distanciation physique améliorée; appuyer la transition de plus de gens à partir des refuges d’urgence et des campements extérieurs vers des logements permanents; aider à payer les couts supplémentaires liés au nettoyage et au personnel liés au « nouveau normal » mentionné ci-dessus.
  1. Le rapport recommande le renforcement de l’Allocation canadienne pour le logement (ACL). Récemment lancée, l’ACL est essentielle à la Stratégie nationale sur le logement et offre une aide financière aux ménages à faible revenu pour leur permettre de payer leur loyer. Il est attendu que la moitié de cet argent proviendra du gouvernement fédéral et l’autre, des gouvernements provinciaux et territoriaux. L’ACL devait être lancée le 1er avril 2020; toutefois, seulement cinq provinces ont signé l’entente. Le gouvernement fédéral pourrait augmenter son apport à l’ACL afin d’encourager le restant des provinces et territoires à en faire autant. Par exemple, le gouvernement fédéral pourrait offrir d’assurer les deux tiers ou les trois quarts des couts.

En conclusion : Les autorités responsables en sans-abrisme à travers le Canada ont travaillé ardemment afin d’améliorer la distanciation physique pendant la pandémie. L’augmentation permanente du financement fédéral aiderait à maintenir le « nouveau normal » tout en trouvant des solutions permanentes de logement abordable pour les personnes itinérantes.

J’aimerais remercier Susan Falvo, Michel Laforge et Vincent St-Martin pour leur appui pendant la rédaction de ce billet.

 

[1] J’ai récemment écrit un autre rapport sur le sans-abrisme engendré par le ralentissement économique. Ce rapport, commandé par Emploi et Développement social Canada, est paru en décembre 2020 et est disponible ici.

 

Lifting singles out of poverty in Canada

Lifting singles out of poverty in Canada

Lifting singles out of poverty in Canada

I’ve written a report for the Montreal-based Institute for Research on Public Policy making the case for higher social assistance benefit levels for employable single adults without dependants. The link to the report is here.

Here are 10 things to know.

1. In Canada, most employable adult singles without dependants who receive social assistance get less than $10,000/yr. in benefits. This amount of money is ridiculously low (keeping in mind that this figure includes all forms of tax credits received by the recipient). A person with this income must use it to pay for housing, food, transportation and other basic necessities (to see benefit levels in every province and territory, check out Welfare in Canada).

2. In relation to Canada’s official poverty line, social assistance benefit levels for this household group are dismal. ‘Welfare income’—which includes social assistance benefit levels, child benefits and all forms of tax credits—brings couples with two children to between 75% and 95% of the federally-defined poverty line, depending on the province (see figure 1 below). However, welfare income for employable singles without dependants typically comes to about 50% of the poverty line for this particular household type.

  

3. In most provinces and territories, $10,000 is less than half of what a minimum wage earner would earn in one year working full-time hours. Historically, policy-makers and economists have often been nervous about setting social assistance benefit levels high enough to make paid work unattractive. However, that shouldn’t be a major concern right now in most parts of Canada, as the differential between welfare incomes and minimum wage rates is currently quite substantial.

4. Increases to social assistance benefit levels could help Canada’s federal government achieve its poverty reduction targets. In Canada, we say a household is in ‘deep income poverty’ if it makes less than 75% of the official poverty line. Canada’s Poverty Reduction Strategy, unveiled in October 2018, seeks to track progress on this indicator. Increases in social assistance benefit levels would be a very easy way for progress to be made in this respect.

5. Doing so could also help provincial and territorial governments achieve their poverty reduction targets. All provinces and territories now have their own poverty reduction strategies; many of these strategies include targets pertaining to reducing the number of people under the poverty line (New Brunswick’s strategy actually seeks to reduce deep income poverty by 50%). Increasing social assistance benefit levels would help all provinces and territories achieve their targets.

6. More than half of people in Canada who are in ‘deep income poverty’ are singles. Not only do singles receive very low social assistance benefit levels relative to other household types, but they also do not realize many of the economies of scale that come with cohabitating (e.g., shared rent, shared utility costs, etc.). This reality makes this household group all the more worthy of policy attention.

7. Higher social assistance benefit levels can result in less homelessness. It’s intuitive for many of us that higher social assistance benefit levels would both reduce the likelihood of a person losing their housing and also increase the likelihood of a person experiencing homelessness to obtain rental housing on the private market. Research by Ron Kneebone and Margarita Wilkins confirms this, estimating that a $1,500/yr. increase in social assistance benefits for an employable single without dependants would (in 2011) reduce the use of shelter beds on any given night by nearly 20%.

8. Higher benefit levels can improve food security. A recent study in British Columbia confirms this, finding that overall rates of food security improved among social assistance recipients after a one-time increase in social assistance benefit levels in that province. 

9. Less homelessness and improved food security would almost certainly result in public cost savings. The costs of homelessness to the taxpayer are well documented, as are the healthcare costs associated with food insecurity. Put differently, increasing public expenditure on social assistance would likely result in public savings elsewhere.

10. While higher benefit levels would likely lead to more takeup, this increased takeup would be modest. That is precisely the finding of a recent Canadian study that I co-authored with Ali Jadidzadeh. We found that a 10% increase in the real value of social assistance benefit levels for this same household group would likely result in an increase in caseloads of less than 5%.

In sum. When it comes to social assistance across Canada, employable single adults without dependants are a very neglected subgroup. Increasing their benefit levels would likely result in less poverty, improved food security and less homelessness.

 

I wish to thank Susan Falvo, Lynn McIntyre, Vincent St-Martin and Val Tarasuk for assistance with this blog post.

Social assistance: Do higher benefit levels lead to higher caseloads?

Social assistance: Do higher benefit levels lead to higher caseloads?

Social assistance: Do higher benefit levels lead to higher caseloads?

I’ve recently co-authored a journal article[1] with Ali Jadidzadeh that asks the question: Do higher social assistance benefit levels lead to greater take-up? The short answer is yes, but that doesn’t mean we shouldn’t increase benefit levels.

Here are 11 things to know about the study.

1. The study looks only at employable adult singles without dependants. Other studies asking the same question have looked at other household groups; but ours focuses on single adults without dependants in part because this group receives very little public policy attention, and in part because they comprise most persons experiencing absolute homelessness in Canada.

2. While the study measures the impact of a variety of independent variables on caseloads, the one we were most interested in was benefit levels. Other independent variables considered in the study are: the official unemployment rate; ‘working poor’ income (e.g., third and fourth decile income); population variation over time; and social assistance rule changes.

3. The study uses three alternative models to estimate the impact of these variables. Essentially, different measurement techniques have their strengths and weaknesses, so it’s common for statistical work like this to use a variety of approaches so that the reader can compare findings.

4. The first model finds an important relationship between benefit levels and caseload growth. Specifically, it finds that a 1% increase in the real (i.e., inflation-adjusted) value of benefit levels results in a 0.372% increase in caseloads. This model uses pooled Ordinary Least Squares (OLS), an approach that doesn’t account for provincial fixed effects (i.e., characteristics of provinces that don’t vary over time). These results should therefore be taken less seriously than the other two models.

5. The second model finds a rather modest relationship between increases in benefit levels and caseload growth. Specifically, it finds that a 1% increase in the real value of benefit levels results in just a 0.157% increase in caseloads. This approach uses fixed effects OLS, meaning it accounts for unobservable provincial characteristics.

6. The third model finds the relationship to be a bit stronger. This approach uses Panel Fully Modified OLS and finds a 1% increase in the real value of benefit levels to result in a 0.457% increase in caseloads. This approach is considered good when researchers want to study long-run relationships between continuous (i.e., quantifiable) variables. It’s a relatively new approach that has gained currency in the past five years.

7. There’s an important takeaway from this. Specifically, a 10% increase in the real value of social assistance benefit levels would likely result in caseload growth for this group of between 1.57% and 4.57%. Many observers would consider this to be modest caseload growth.

8. Rule changes are important, but they are difficult to measure. In the mid-1990s, several large provinces introduced strict eligibility criteria (including the introduction of work-for-welfare provisions). The study finds their impact in reducing caseloads to be statistically significant. However, in general, it is very challenging for statistical analysis to measure the impact of rule changes on caseloads.

9. The unemployment rate has a modest impact on caseloads. In the first model, a one percentage point decrease in the unemployment rate is found to be associated with a 7.3% drop in caseloads (in the second model, it’s associated with a 5.8% drop). One implication from this is that provincial and territorial officials should not expect job creation alone to wipe out social assistance caseloads for employable singles.

10. The study cautions policymakers against focusing too much on the sizes of caseloads. In other words, when deciding on the appropriate levels of benefits, the study encourages policymakers to consider positive outcomes associated with higher benefit levels.

11. Higher social assistance benefit levels can help accomplish other policy objectives. As the study points out, they can reduce the percentage of Canadians living in poverty, reduce levels of food insecurity, improve health outcomes and reduce homelessness (all of which can result in savings of their own to the taxpayer). So if higher benefit levels also result in modest caseload growth, that may not be so bad. 

In sum. There are many positive outcomes associated with higher social assistance benefit levels. Having said that, when policymakers decide to increase benefit levels, they should budget for some increased take-up.

I wish to thank the following individuals for assistance with this blog post: Susan Falvo, Ali Jadidzadeh, Richard Shillington and Vincent St-Martin.

[1] For a full copy of the article, please email me at falvo.nicholas@gmail.com.